A la rencontre du chant des sources et de la symbolique du feu à la Sainte-Baume
A l’orée de la forêt de la Sainte Baume, je me sens accueillie par le grand chêne Herakles, gardien imposant et rayonnant, bien qu’affaibli par le piétinement humain qui abîme cet humus précieux dont il tire ses substances vitales. Le respect du vivant s’apprend déjà ici, en évitant de piétiner au pied des arbres.
Une vibration subtile et mystérieuse guide le visiteur. S’il est attentif et monte en silence, recueilli en lui même, la forêt se révèle à lui dans ses aspects intimes, s’adressant avec délicatesse au profond de l’être. Après une petite montée, voici une première étape rafraîchissante, la source Saint Zacharie, en face de laquelle se déploie Merlin, autre chêne célèbre de la forêt. Protégée de la flamme solaire, dans l’ombre aérée des arbres centenaires, je me sens comme enveloppée d’un mystère flottant, du genre « les brumes d’Avalon ». J’écoute avec tout mon corps, tout mon cœur, tout mon être. L’esprit de la forêt est-il en train de me saisir, de m’enlever littéralement au monde extérieur ? L’eau jaillissante de la fontaine me propose un premier apaisement, l’eau qui coule dans ma gorge est une eau de vie, une eau mobile qui réjouit toutes mes cellules. Je ressens à quel point tous les éléments se donnent le mot, dans un subtil mouvement, dans une subtile harmonie, pour éveiller une partie de moi qui se reconnaît dans un magique effet miroir. Oui, je me sens comme ensorcelée, et les légendes du lieu me reviennent à l’esprit. Surtout l’histoire de Daphné, transformée en laurier pour échapper aux ardeurs d’Apollon. Partout où pousse le laurier lauréole, Daphné serait passée, laissant son empreinte fleurie, dit la légende.
Il souffle en moi comme un air inédit, un murmure, une poésie qui me touche au cœur, qui me touche à l’âme. Le souffle, le souffle de vie, ce souffle pur qui m’a été offert à ma naissance, le voilà renouvelé, vivifié, amplifié, démultiplié.
Cette magie du lieu, elle me semble venir de cette union intime des éléments, la terre, l’air, l’eau, le feu … et l’éther, élément subtil souvent associé à l’Esprit, ce souffle qui descend du royaume divin et s’incarne dans la matière, unissant le ciel et la terre, manifestant cette alchimie royale dont nous sommes tous issus.
Dans cet univers où rien n’est séparé, l’arbre se révèle à moi comme le symbole de cette union, lui qui plonge ses racines au cœur de la terre et élève ses branches vers les étoiles du ciel. Je choisis un arbre pour lui confier ma découverte. M’approchant avec délicatesse, mes mains vont lentement à la rencontre de son corps d’énergie, je le palpe avec respect, demandant comme une permission de venir me blottir contre lui pour un câlin inédit, attentif à qui il est, à la rencontre de sa vibration singulière. Alors je m’abandonne dans cette union, dans cette communion, mon souffle devient plus fluide, mon cœur se calme, je vibre à l’unisson de cette nature mystérieuse et généreuse. De cette rencontre, je ressors grandie, mes yeux voient bien plus clair, un silence bien vivant emplit mon cœur, et c’est avec gratitude que je continue mon chemin, nourrie de cet essentiel indicible, que la nature offre abondamment.
Edition 2014 - Rosemarine