Le Cauron, la rivière oubliée
A l’Est de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume, coulait jadis paisiblement le Cauron, affluent de l’Argens, qui est le principal fleuve du département du Var.
Petite rivière à l’allure d’un ruisseau qui serpentait entre les collines, le Cauron s’appelait autrefois Carrawan, qui se traduit par « l’eau qui porte » (qui charrie du bois). L’évolution du mot en provençal a donné son nom actuel. Ce cours d’eau naissait sur le bassin nord de notre mystérieuse montagne de La Sainte Baume, près de Nans-les-Pins. La Grande Foux en était la principale source du Cauron.
En 1967, pour alimenter en eau la commune, la municipalité de Nans-les-Pins mit en place un pompage directement dans la cavité de La Grande Foux. Depuis cet évènement, et avec le dérèglement climatique actuel, l’eau ne jaillit plus, le lit de la rivière est à sec. Le Cauron a ainsi disparu sur les deux tiers de son parcours actuel. Il renaît seulement en aval sur le Bassin de Bras, là où il est à nouveau alimenté par des sources telles que les Gours Bénis, quelques kilomètres avant de s’abandonner dans l’Argens sur le site du Tombereau.
Pour la petite histoire locale, au début de notre ère, vers l’an 58 ap JC, l’empereur Néron donna l’ordre de continuer la construction de la voie Aurélienne (voie Romaine) de Ad Turrem (Tourves) à Tegula (Pourrières). Un petit pont en pierre de taille fut édifié pour traverser le Cauron. Cet ouvrage, qui s’est depuis bien longtemps effondré n’a laissé que quelques vestiges dispersés sur les berges asséchées et envahis par une dense végétation.
Ma grand-mère Denise me racontait qu’autrefois, dans les années 1940, aux beaux jours, elle allait avec son frère se baigner dans le Cauron. L’eau y était claire et fraîche, juste réchauffée par de maigres rayons de soleil qui passaient entre les feuillages des grands chênes qui bordaient le lit du cours d’eau. C’était le lieu de vie où se réunissaient les enfants des petits villages voisins. Certains, munis d’une canne à pêche de fortune, avec un simple bâton, s’en allaient pêcher le petit goujon local. Quelques truites discrètes dérangées par les jeux, partaient à toute vitesse!
Les insectes volaient un peu partout, les libellules et les demoiselles œuvraient dans un ballet multicolore. La flore y était généreuse et odorante, la magie du site était bien présente.
Depuis le captage de la source et avec l’activité de l’homme en général, l’eau a cessé de couler et la vie dans le lit de la rivière s’est estompée.
Parfois, après quelques grandes pluies, l’eau de la Sainte Baume nous rappelle, dans des moments éphémères et tumultueux que le Cauron est toujours là et charrie ponctuellement le bois comme l’origine de son nom l’indique.
L’eau est l’essence de la matière vivante sur cette terre, le Cauron en était un exemple
Edition 2023 - A ma grand-mère Denise, Maxime SARDO