L’oratoire Saint Dominique
Il a été aménagé en 1970 dans l’aile gauche de l’hôtellerie par Thomas Gleb à l’emplacement d’un ancien musée magdaléen. C’est le prieur de l’époque, le père Philippe Maillard, qui a fait appel à cet artiste juif d’origine polonaise.
De son vrai nom Yéhouda Chaïm Kalman, Thomas Gleb (c’est le pseudonyme qu’il avait choisi) est né en 1912, près de Lodz. Fils d’un tisserand, il a exercé de nombreuses activités dans le domaine artistique, notamment la peinture et la sculpture. En 1932, il s’est installé à Paris où il a poursuivi ses recherches picturales et fondé une famille. Engagé volontaire au début de la dernière guerre, puis démobilisé, il est entré dans un réseau de résistance juive. Arrêté par la Gestapo, il a réussi à s’évader et s’est caché dans les Vosges jusqu’à la Libération. Après quelques années passées en Pologne, il est revenu définitivement en France. Redécouvrant la tapisserie, il a alors réalisé une série de chefs-d’oeuvre qu’il a exposés dans de nombreux pays. « Homme d’éternité », il est décédé en 1991 à Angers qui conserve dans son musée une partie des collections léguées par l’artiste.
Sans renier des racines juives pleinement assumées, l’artiste a voulu associer, dans un élan d’œcuménisme, les trois grandes religions monothéistes qui convergent dans l’adoration d’un Dieu unique. Silence et sobriété font de cet espace de lumière un lieu privilégié de recueillement. Le mobilier, réduit au strict nécessaire et l’ornementation générale, très dépouillée, favorisent une sensation profonde de transcendance.
Placé au centre de l’édifice, l’autel présente de profondes entailles d’où jaillit la lumière. Il repose sur un bloc de pierre formant la lettre « aleph », à l’origine de toute chose. Lorsqu’on entre, le regard est immédiatement attiré par une imposante tapisserie (de 16 m2) dont l’unique trait rouge central interpelle au milieu d’un tracé ovale qui n’est pas sans rappeler l’athanor des alchimistes. Elle représente « les noces de l’agneau » qui scellent dans le ciel l’union de Dieu avec ses fidèles. On pénètre dans l’oratoire par le côté ouest. Véritable « mur de lumière » creusé dans la façade, une sorte de vitrail formé de plaques de verre translucide et incolore dessine les lettres hébraïques du mot ELI (« mon Dieu ». Il est surmonté d’un oculus qui appelle à l’unité.
Il existe des points communs entre les grandes religions. Des esprits éclairés, comme Thomas Gleb, ont su mettre en évidence les liens qui les unissent.
Noircie par la poussière, la tapisserie des Noces de l’Agneau à été restaurée en 2012 à l’initiative du centre Thomas Gleb (de Saint-Germain-en-Laye). L’oratoire lui-même, déjà remis en état à la même période, a malheureusement souffert des intempéries et mériterait une nouvelle intervention.
Edition 2025 - Alain Bontemps